Les huttes de Bekopaka
Nous sommes arrivés dans l’après-midi à l’issue d’une longue matinée qui avait consisté à achever notre aventure en pirogue, prendre possession de nos 4×4, rejoindre Belo sur Tsiribihina et y déjeuner, puis atteindre Bekopaka où nous allions passer deux nuits. Bekopaka est le point de départ de la visite des si attendues Tsingy (en malagasy « marche sur la pointe des pieds » rapport aux aiguilles qui se sont formées dans le calcaire)!
Le camping est hôtel / restaurant aussi. Tandis que l’habitat est de paille et de chaume dans cette partie de Madagascar, les bungalows de l’hôtel (qui ont beau être rustiques) sont en dur. L’après-midi est contemplative et la troupe fatiguée. La plateforme qui sert de restaurant domine la plaine et offrira un merveilleux panorama de fin de journée.
Dessin des bungalows à la chaleur de l’après-midi. Installation dans les tentes, plan d’action des prochains jours avec les 3 chinois et Andréa.
Le dessin se fait au calme et pourtant au loin, un chant d’oiseau étrange… Le coulou paraît-il ?!
Samedi 17 avril 1999, Madagascar. Entre Belo Tsiribihina et Bekopaka
Après un petit déjeuner copieux à l’hôtel, les 4X4 prennent la piste en direction du nord. Celle-ci est totalement défoncée. Faute de matériel d’entretien, elle se dégrade rapidement après chaque orage tropical. Durant les quatre heures de route nous avons été malmenés, sautant d’un bord à l’autre des sièges. Puis, brusquement notre véhicule s’élève et retombe brutalement sur une butte de terre, les quatre roues tournent dans le vide. Sous un soleil de plomb, après une demi-heure passée à creuser sous le châssis, les roues retrouvent le plancher des zébus. Enfin, nous atteignons le dernier village Ankilizato. Les 4X4 ne peuvent aller plus avant. La piste est en plusieurs endroits entièrement submergée par les dernières pluies. Ce sont les charrettes à zébus qui assureront notre transport jusqu’au fleuve Manambolo. Nous équipons six charrettes dont une pour les bagages. A 16h, tout ce petit monde se met en route sous le regard narquois des villageois. Nous ne le savions pas, mais la galère venait de commencer…
Nous partons à petite allure afin de nous habituer aux trous de la piste. Après une mise en condition d’un quart d’heure, sur les ordres des conducteurs, le fameux cri : « a ha tti », les zébus prennent de la vitesse. Soudain, nous entendons un cri venant de la charrette qui nous précède, mais il est trop tard. Les bêtes plongent, une énorme gerbe d’eau passe au-dessus de nos têtes et se rabat. Le plancher est noyé sous dix centimètres d’eau boueuse. Nous n’avons pas eu le temps de lever quoi que ce soit. Nous sommes trempés des pieds jusqu’au nombril, et les sacs à dos ont souffert. L’air est encore chaud, les habits sèchent rapidement. La nuit arrive très vite sous un faible rayon de lune qui tend à disparaître. A la lumière du jour, nous pouvions éviter les branches basses des arbustes qui jalonnent la piste. Mais à présent, la nuit est noire et la visibilité est pratiquement nulle. Le conducteur crie à chaque obstacle. Nous sommes recroquevillés la tête dans les épaules. Plusieurs pistes se croisent et se rejoignent dans le bush. Les pisteurs sont perdus. Les charrettes tournent en rond, se croisent, s’entrechoquent. Les zébus s’affolent. Ils faut les maîtriser. A un moment, nous sommes bloqués dans un marigot. A la lumière des lampes, des yeux brillent au ras de l’eau. Nous dérangeons les rares crocodiles de Madagascar. Il est deux heure du matin, la délivrance arrive, nous atteignons enfin le fleuve. Le passeur est réveillé. Deux pirogues sont attachées l’une à l’autre. Dix minutes de traversée, les pieds dans l’eau, et nous débarquons sur la rive opposée. Tout le monde s’écroule sur les bagages. Un vieux 4X4 poussiéreux nous amène jusqu’à l’auberge à Bekopaka.
Il est 4h30 du matin, je pénètre dans une pièce aux murs crasseux. Je m’écroule sur un lit…
Merci pour votre joli récit partagé…